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"Solénoïde" - Mircea Cărtărescu

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"Car, en effet, la beauté est toujours la rencontre sur une table de dissection du parapluie et de la machine à coudre." Quelques faits ? Le narrateur enseigne le roumain dans un collège de la périphérie de Bucarest. Un humiliant échec -une critique aussi violente que moqueuse d’un de ses poèmes lu à un cercle d’étudiants- l’a des années plus tôt fait renoncer à son rêves de devenir écrivain.  Il a été marié mais vit dorénavant seul, bien qu’il entretienne une liaison avec sa collègue Irina, professeure de physique dont les admirables yeux bleus compensent les airs de martyre. Il vit dans une grande maison en forme de navire, située dans une rue où règne un éternel automne, peuplée de campements de tziganes, où aucune habitation n’est normale, une rue à l’entrée de laquelle la réalité s’arrête…. (Voilà, ça commence à dérailler… impossible d’évoquer des faits en occultant la manière dont ils sont tordus, amplifiés, par la lecture qu’en fait le narrateur). Son éviction précoce ...

"La tante Julia et le scribouillard" - Mario Vargas Llosa

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"(…) les livres sortaient de cette petite tête obstinée et de ces mains infatigables, l'un après l'autre, à la mesure adéquate, comme des chapelets de saucisses d'une machine." Varguitas, narrateur et double de l’auteur, revient sur une période de sa jeunesse.  Nous sommes dans les années 1950, et il étudie alors le droit, sans grande conviction mais avec résignation (se soumettant au souhait de sa " cancéreuse famille "), à l’université de Lima (lui aurait préféré devenir écrivain). Pour arrondir ses fins de mois, il rédige et diffuse les actualités à l’antenne de Radio Panama, des bulletins d’une minute chaque heure, ce qui lui laisse le temps de suivre ses cours à la fac, mais aussi et surtout de traîner dans les couloirs de Radio Central, dont son patron est également propriétaire. Autant Radio Panama, snob et cosmopolite, se veut moderne en diffusant essentiellement du jazz et du rock, autant Radio Central est plébéienne, voire populacière. On y pas...

"Sa majesté des mouches" - Aimée de Jongh, d’après l’œuvre de William Golding

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"- Ptêt qu'y a une bête. - Toi, Simon ? Toi, tu y crois ? - Ptêt qu'en fait, c'est nous." L’intrigue est généralement connue, même par ceux qui comme moi n’ont pas lu le roman de William Golding. Suite à un crash aérien, un groupe d’écoliers âgés de six à treize ans se retrouvent sur une île déserte. Afin d’organiser leur survie -entretien du feu, quête de nourriture…-, ils désignent un chef, Ralph, douze ans, qui peut compter sur le soutien du souffreteux "Cochonnet", dont la silhouette rondouillarde suscite les moqueries, et du timide Simon. Dans un premier temps, emportés par leur jeunesse, cette soudaine liberté et l’environnement paradisiaque, l’ambiance est au jeu et à la joie. Mais bientôt les nuits des enfants sont peuplées de cauchemars provoqués par la présence hypothétique d’une créature monstrueuse, et des rivalités naissantes, aiguisées par les velléités de domination d’un certain Jack, font basculer le groupe dans une violence croissante… L...

"Qui se souviendra de Phily-Jo ?" - Marcus Malte

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"Je ne crois pas au diable, mais je sais qu’il existe." La mort de Philip-Joseph Deloncle, dit Phily-Jo, survenue un soir de décembre 1997, fut à l’image de sa vie, à la fois poignante et grotesque. Alors âgé de trente-quatre ans, l’homme a chuté de la terrasse d’un hôtel de Dallas où se tenait, en l’honneur des lauréats d’un prix scientifique, un cocktail auquel il n’était pas convié. Accident ou suicide, voire meurtre… ? Telle est la question que se pose Gary Sanz, professeur d’université piqué d’ambitions littéraires, et narrateur. Il était par ailleurs très proche de Phily-Jo, dont il avait épousé la sœur Michelle. A la mort de celui-ci, le couple s’est vu remettre, par un avocat ressemblant à s’y méprendre à J.R. Ewing, une dizaine de cahiers rédigés par le défunt, détaillant l’extraordinaire découverte faite par ce dernier (à la hauteur, prétendait-il, de de la révolution copernicienne), et les déboires qu’elle lui ont valus. Ayant trouvé le moyen, à l’aide d’une machin...

"Qui après nous vivrez" - Hervé Le Corre

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"J’étais là quand tout a commencé vraiment à finir." Moitié du XXIème siècle, dans "un monde finissant qui n’en finit plus", où l’on s’étonne que le soleil se lève encore chaque matin... Un monde dévasté, parsemé de forêts de troncs morts, calcinés... Les êtres y survivent -ou pas- en se jetant dans l’errance, en quête d’un abri, de nourriture, tentant d’échapper aux brutes en quête de proies, auxquelles l’époque est propice. La mère de Léo n’a pas su leur échapper. Des années auparavant, il a assisté impuissant à son viol puis à son meurtre. A douze ans, il en garde un profond traumatisme et la conviction de son irrémédiable vulnérabilité, persuadé qu’il n’acquerra jamais ni la force ni la beauté de son père Marceau. Ils ne sont pas seuls. Nour et sa fille Clara, du même âge que Léo, rencontrées au cours de leurs pérégrinations, les accompagnent. Aucun désir ni aucune tendresse ne lient les deux adultes, focalisés sur un impératif de survie qui n’autorise au mieux ...

"Parce que les fleurs sont blanches" - Gerbrand Bakker

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"On dit parfois que le temps guérit toutes les blessures. Un cliché terrible, que les gens sortent quand ils ne savent vraiment plus quoi dire. C'est strictement faux en plus. Il y a des gens qui meurent de leurs blessures et, quand vous êtes mort, il n'y a plus grand-chose à guérir." Depuis le départ de la mère, leur cellule familiale est devenue exclusivement masculine. Elle est partie à l’étranger, paraît-il, avec un autre homme, sans doute en Italie, d’où elle leur envoie, cinq fois par an, à l’occasion de Noël ou des anniversaires, des cartes postales. Même le chien Daan, qui a tant pleuré son absence -comme pour les garçons, elle était sa préférée -, a fini par comprendre qu’elle ne reviendra pas. C’est donc leur père Gerard qui s’occupe d’eux, assurant le quotidien, les visites aux grands-parents et l’organisation des grandes vacances, dans une région de France chaque fois différente où ils se rendent à bord d’une vieille guimbarde à la couleur indéterminée. Eu...

"L’île des âmes" - Piergiorgio Pulixi

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"Les bons flics sont de méchants flics." Ah, la Sardaigne… ses criques aux eaux turquoise et ses pittoresques petits ports, ses grottes secrètes et ses ânes albinos… Eva Croce aurait pu y venir en touriste. Elle apprécie d’ailleurs la beauté de l’île et la manière dont le temps s’y écoule, comme s’il était plus distendu… Mais c’est pour des raisons un peu moins folichonnes qu’elle a quitté l’agitation turinoise pour Cagliari. Enquêtrice anciennement spécialisée dans les crimes sanglants, elle s’occupe dorénavant des affaires non élucidées. Officiellement, sa mutation dans la capitale sarde a pour objectif d’aider la police locale à mettre en place sa propre unité de cold cases . Officieusement, sa hiérarchie n’a guère apprécié sa tentative de dévoiler les magouilles d’une huile intouchable, et à vrai dire, cela arrangeait bien Eva de partir, pour laisser derrière elle la dévastation de sa vie personnelle. Mara Rais a aussi, en quelque sorte, été mise au placard. Son caractère...